L'histoire
d'Adjzobah GHATTABAH pourrait
commencer par
la parodie d'une célèbre
publicité pour une marque
de couverts. A l'école,
ce petit Ghanéen trouvait
davantage son plaisir dans les
arts plastiques. Trés tôt,
dans les cours de poterie, il se
passionna pour l'argile. "J'aimais
faire de grandes sculptures, tellement
grandes que cela me valut le surnom
de Big Big."
Le petit Joe au grand talent naissant
a naturellement été orienté vers
le collège d'art de Kumassi où il a pu perfectionner à loisir
ses qualités naturelles. L'argile, bien sûr, est son premier et
plus sûr allié. Mais curieux de tout il s'essaie avec réussite à la
sculpture sur bois et sur pierre. Il touche au bronze, à la technique
du moulage, et ne vit son art qu'en trois dimensions. Un jour il est tombé sur
une pelote de fil de fer. "J'ai alors réalisé une statuette
qui a beaucoup plu". Dès lors Joe Big Big va dérouler des
kilomètres d'ingénuosité et de créativité.
Grâce à ce matériau malléable, il retrace la vie africaine,
dresse les portraits des gens des villages, de l'homme, de la femme, des amoureux
aussi.
Comme lorsqu'il était à l'école, le goût pour la grandeur
reprend le dessus et aux statuettes se substituent des oeuvres désormais
plus monumentales. Après un passage reconnu à Niamey (Niger), il
est réclamé par la galerie Aderco d'Avignon. Cette première
venue en France sera suivie d'un passage remarqué à Orleans, puisqu'à la
galerie L'Escalier, on s'arrache les 32 oeuvres présentées.
Conquis par Toulouse, il a choisi de s'installer dans la ville rose.
Pas pour y faire la fête mais bien pour y travailler avec un acharnement
rare. "J'aime bien travailler la nuit. C'est pourquoi je me lève
tous les jours à deux heures."
Véritable ascète, il ne mange pas le soir, ne boit pas de café,
ne touche pas une goutte d'alcool et ne fume pas.
"
Mon art est ma nourriture. Le plus important c'est dans la tête."
C'est peut être dans cette vie quasi monacale que Joe Big Big trouve l'inspiration
et surtout la concentration nécessaires à la réalisation
de ses sculptures entortillées. Il est d'ailleurs curieux de constater
combien ces objets métalliques ont une âme.
Balancé entre ses vocations d'être tour à tour clé ou
cadenas, le fer fait ici jaillir une symbolique forte, celle d'être attentif à la
civilisation humaine et à sa protection. (Christophe ANDRIEU)
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