Formation
Naissance
en 1957 à Accra En 1984,
formation dans les studios de
Saka ACQUAYE. En 1985, découverte
du travail de Richard HUNT et
son utilisation du métal.
Professionalisation à partir
de 1991 avec expositions internationales
aux Etats Unis en Europe, en Afrique.
A Accra ses oeuvres sont exposées
à Artists Alliance Gallery.
Remarqué par l'ensemble
de la critique pour son travail
sur le génocide rwandais
(présenté notamment
à la Biennale des Arts
DAK'ART 2000 et dans le cadre
de la manifestation l'Afrique
en scène à Lille).
Notes
"Ma
sculpture n'est ni bonne ni mauvaise,
elle est mienne; elle peut-être
vôtre
et si elle est
nôtre
disons que pour
le meilleur ou le pire, cet art
nous exprime". Le ton est
posé. Le regard direct,
Kofi Setordji résume là
tout le sens de sa démarche
artistique. Sa principale préoccupation
est d'instaurer un dialogue entre
l'uvre, et celui qui la
regarde. Ce dialogue, il a su
parfaitement l'installer au cours
de son exposition à l'espace
MC2a de Bordeaux. Exposition évolutive
où l'Homme demeure le thème
central, qui s'est constituée
au rythme des sculptures qu'il
aura réalisées durant
son séjour. Kofi Setordji
travaille dans l'instant, avec
la spontanéité d'un
artiste qui refuse de se laisser
enfermer dans un carcan : ni courant
ni influence artistique. "Je
ne cherche pas à intellectualiser
mon travail, à savoir comment
je dois faire pour devenir Picasso,
je travaille spontanément".A
son arrivée en Aquitaine,
Kofi n'avait pas d'idée
précise sur ce qu'il allait
faire. Il a construit son exposition
à partir des différents
bois mis à sa disposition,
provenant d'Afrique ou de la région
bordelaise, auxquels il a ajouté
de la ferraille, divers objets
tels des casques ou des masques
à gaz, récupérés
ça et là ou glanés
au marché. Le reste est
affaire de regard et de "feeling".
"J'ai regardé autour
de moi, je me suis laissé
imprégner par les choses
et j'ai transposé avec
ce que je savais faire. Je suis
parti de la réalité
d'ici". Réalité
d'une société de
consommation dont l'opulence l'a
frappé. D'où ces
trois effigies de bois et de cordes,
"Body, Mind and Soul"
(corps, esprit et âme) qui
auraient été différentes
si elles avaient été
faites en Afrique : "Nous
avons trois personnalités,
nous devons trouver l'équilibre
entre les trois. Ici, il y a tellement
de choses, tellement d'argent,
que c'est le corps qui prime.
Alors qu'en Afrique, parce que
les gens n'ont rien d'autre, le
spirituel est plus important".Des
bribes de conversations entendues
dans un restaurant deviennent
"L'Homme qui ne veut pas
voir de l'autre côté",
visage de bois sculpté,
en partie caché par une
main qui le prolonge comme une
excroissance démesurée.
D'un soir de match de football
où les gens étaient
réunis devant leur poste
de télévision sont
nés "les champions",
étrange alignement de figures
de bois, plongées dans
une sorte de recueillement, qui
pourrait évoquer la gravité
des suppliciés. Ou encore
"L'Homme à l'antenne",
inspiré par les nombreux
passants croisés un téléphone
portable collé à
l'oreille. "Tout ce que j'ai
fait ici est né d'un sentiment.
J'entends des choses, j'assiste
à des scènes de
vies et les sons, les situations
deviennent des images à
partir desquelles je peux créer".
La puissance créatrice
de Kofi Setordji réside
en partie dans cette capacité
à sacraliser la vie, à
partir d'une anecdote qui, une
fois transposée, donne
une uvre sobre, évidente,
qui tend vers l'universalité.
A celui qui la regarde de sentir
et de transposer à son
tour.Pour que l'horreur ne soit
pas reléguée au
rang de l'anecdote, parce qu'en
tant que citoyen d'abord, puis
en tant qu'artiste, il ne pouvait
pas rester silencieux, Kofi Setordji
a travaillé durant plus
d'un an à une installation
sur le génocide rwandais
- exposée à la dernière
biennale de Dakar. "Les Africains
ne veulent par regarder leurs
problèmes en face. Nous
devons nous questionner et interroger
notre histoire afin de comprendre
pourquoi ce génocide a
eu lieu. Il n'y a qu'ainsi que
nous pourrons avancer". Pour
lui, l'artiste a incontestablement
un rôle à jouer dans
la société : pas
forcément politique, mais
plutôt observateur, scrutateur,
capable de saisir les choses,
de les fixer et de les restituer
dans leur absolue vérité,
quelle qu'elle soit. Il déplore
qu'en Afrique si peu de place
soit accordée aux artistes.
Le Ghana qui, contrairement à
d'autres pays africains, a une
solide tradition d'arts plastiques,
n'a pas de lieu d'accueil pour
les artistes contemporains. "Nous
avons des critiques, des galeries,
des artistes qui font des choses
mais nous n'avons pas de galerie
d'art contemporain. Nous ne pouvons
rien montrer faute de lieu. C'est
comme si rien ne se faisait. L'évolution
artistique de nos pays reste invisible".
De même, il regrette le
manque d'échanges entre
les artistes d'Afrique francophone
et les artistes anglophones. C'est
pourquoi, il projette d'ouvrir
un lieu où les artistes
africains, toutes cultures confondues,
pourraient venir travailler en
résidence. Mais que l'on
ne s'y trompe pas, s'il prône
l'échange entre les artistes
vivant sur le continent africain,
Kofi Setordji s'insurge contre
le "label" "art
africain". "Un artiste
qui produit en Afrique ne fera
pas la même chose s'il produisait
en occident. Il y a une chose
en laquelle je crois très
fort, c'est que lorsqu'on travaille,
il ne faut pas ignorer notre environnement.
Comment peut-on définir
dans ces conditions ce qui est
africain de ce qui ne l'est pas.
Je suis ici à Bordeaux,
je suis Africain, peut-on dire
que ce que je fais ici est africain
? Non, c'est de l'art, c'est tout!
Ce n'est pas de l'art africain,
c'est l'expression de ce que j'ai
ressenti ici".
Virginie
Andriamirado